LA BATAILLE DE LA PASSE DU FEU NOIR

-1 C.I.

The Empire at War - p78 et suivantes
Traduction Wilheim Von Carstein, Jérôme et PA

Empire at War se présente comme un ouvrage de leçons militaires écrit par le Grandmarshall Blucher von Vincke et imprimé à Altdorf 2523 CI. Cinq batailles sont présentées dont un chapitre sur la bataille de la Passe du Feu Noir traduite ci-dessous. Le propos historique est interrompu par des digressions pédagogiques du pseudo-auteur mais le contenu est tout de même bon à prendre.

Comme souvent, il faut regarder avec un prisme réducteur les exploits relatés et les effectifs en présence. Il n'est pas surprenant pour une bataille aussi ancienne et légendaire de voir les faits assez déformés. Déjà, les combats ont lieu dans une passe assez étroite : on ne peut pas y aligner des dizaines de milliers de combattants de front ! De plus, les nations humaines sont certainement de taille modestes à l’époque. Aussi fondatrice que fut cette bataille, elle n’est certainement pas la plus grande que les hommes aient menée.

"La férocité de l’attaque fit trembler la ligne des orques. La voyant fléchir, Sigmar porta son cor de guerre à ses lèvres. A l’écoute de ce son de ralliement, ses hommes redoublèrent d’efforts. Le cœur de Sigmar se souleva quand il vit les chariots de la reine Freya s’écraser sur la ligne des orques, projetant des corps brisés dans les airs alors que les roues à faux tranchaient dans la chair et fauchaient des jambes. Les auriges tiraient flèches après flèches, chacune trouvant sa cible avec une efficacité meurtrière. Les orques reculèrent en désordre."
- La vie de Sigmar
Illustration bataille de la Passe du Feu Noir

La bataille de la Passe du Feu Noir est la plus importante bataille à laquelle participèrent les hommes. Les implications immédiates de la fameuse victoire de Sigmar étaient évidentes : la plus grande armée d’orques jamais rassemblée fut détruite avant d’avoir pu ravager nos terres. Cependant, le plus grand héritage de cette bataille n’était pas seulement là : la victoire concrétisa l’idée de l’unité entre les différentes tribus humaines.

Grâce à ce danger commun et cette ultime victoire, les hommes se découvrirent un but commun : la survie. Et ils apprirent que c’était ensemble qu’il l’atteindrait. Sigmar avait découvert cela bien avant que les orques eurent commencés à se rassembler sur les pentes et les ravins de la Passe du Feu Noir, mais il fallut que soit menacé l’humanité pour faire comprendre cela aux autres chefs humains.

L’Empire où nous vivons aujourd’hui, avec son Empereur élu, ses Comtes Électeurs, ses routes, son commerce, ses armées, ses universités, ses arts, sa culture, ses presses d’imprimerie et sa sécurité sont un résultat direct de la main directrice de Sigmar, et de l’union des hommes qu’il forgea en ces temps historiques.

L’unité des forces est essentielle au sein d’une armée. Les armées sont des entités complexes, et chacune de ses pièces, qu’il s’agisse d’une unité de chevaliers, d’une batterie d’artillerie ou d’une unité d’éclaireurs, doit être capable de travailler indépendamment mais aussi de participer à un plus grand tout. Pour être plus efficaces, les soldats ont besoin d’un but commun, d’une raison de se battre, de quelque chose qu’ils partagent. Un soldat motivé en vaut trois qui n’aurait aucune raison de se battre.

Aujourd’hui, les armées sont composées d’une grande variété de troupes et aucune armée n’est identique. En mon temps, j’ai pu commander des levées paysannes, armées de bâtons et de faux, des mercenaires venus de Tilée et d’Estalie, des artilleurs professionnels venus de Nuln, des halflings, des chevaliers de la Reiksguard, des régiments réguliers de lanciers et de joueurs d’épée. Ces hommes viennent de différents états et de toutes les couches de la population. Ils sont habités par une méfiance naturelle à l’égard de ceux qui ne viennent pas de leur village ou de leur ville. Malgré cela, j’ai pu en faire des armées soudées, disciplinées, et j’ai fait cela en leur offrant un but commun, instillant dans leur cœur une fierté de l’armée qu’ils servaient.

J’ai appris cela de Sigmar.

UNE TERRE DIVISÉE

A l’époque de Sigmar, la terre que nous appelons maintenant l’Empire était divisée en de nombreuses tribus et factions. Ces tribus étaient farouchement indépendantes. Elles s’observaient l’une l’autre avec méfiance. Ces petits royaumes se battaient entre eux à cause d’anciennes querelles ou lorsqu’il y avait de nouvelles opportunités de gain personnel. Ainsi en était-il depuis des milliers d’années. La guerre était leur mode de vie, indispensable à leur survie. A l’époque de Sigmar, le faible n’avait pas sa place.

Cependant, les choses avaient commencé à changer. La guerre était constante, mais les hommes comprenaient de plus en plus les bénéfices qu’ils pouvaient retirer du commerce. Les routes rendaient les déplacements plus faciles, et les tribus commençaient à communiquer, échanger, et développer des liens les unes avec les autres, ainsi qu’avec les elfes et les nains. Les premières graines d’une nation unifiée ont été plantées à ce moment-là, mais les racines de ce futur arbre en étaient encore faibles et débiles. C’est alors qu’un homme comprit que le temps du changement était venu.

Sigmar, le chef de guerre de la tribu des Umberogens, connaissait la force de la diplomatie aussi bien que celle de l’épée. Grâce à un mélange d’alliances, de commerce, de menaces et de conquêtes, il commença le processus d’unification des terres, qui arriva à son terme lorsqu’il valut former un front commun à la bataille de la Passe du Feu Noir.

LA TEMPÊTE AVANT L’OURAGAN

Lors des années précédant la bataille de la Passe du Feu Noir, les terres des hommes furent la proie d’attaques dévastatrices de la part des orques et gobelins. Les Peaux-Vertes descendirent en nombre jamais vu jusqu’alors des montagnes à l’est et à l’ouest. L’odeur du sang d’un ennemi affaiblit rendit les orques fous et notre race était en danger.

Après des années de guerre débilitante, Sigmar et ses alliés arrivèrent à repousser les envahisseurs au sud, de l’autre côté des rivières Stir et Aver. Cependant, ce territoire compris entre les Montagnes Noires et les Montages Grises était complètement perdu. Les villes étaient affamées par les sièges et ceux qui purent s’échapper s’enfuirent vers le nord ou se cachèrent dans les profondeurs des forêts. Les routes étaient encombrées de réfugiés et Sigmar ordonna que chacun reçoive un abri. Mais pendant combien de temps pouvait-il garantir cette protection ? L’ennemi se renforçait : toujours plus des Peaux-Vertes arrivaient des montagnes, désireux de piller et de détruire les faibles tribus des hommes.

Sigmar avait déjà forgé des alliances avec beaucoup de tribus parmi les plus puissantes et il combattit avec elles pour repousser les orques de leurs terres. Mais le flot des Peaux-Vertes était sans fin et beaucoup pensaient que la fin du monde était arrivée. Les hommes ne faisaient plus face à des tribus d’orques désunies -qui étaient aussi bien capables de se battre entre elles. De manière inconcevable, les orques s’étaient unis dans leur quête d’anéantissement de l’humanité, et il semblait bien que même les forces combinées de tous les hommes ne seraient pas suffisantes pour les retenir.

Alors que le destin de l’humanité se balançait sur le fil du rasoir, Sigmar fit appel à son vieil allié le roi Kurgan Barbe-de-Fer [Ironbeard en VO], le roi nain qu’il avait sauvé des orques, et qui l’avait remercié en lui faisant cadeau de Ghal Maraz. Fidèle à son serment d’allégeance, Barbe-de-Fer vint à l’aide de Sigmar et les orques furent écrasés entre leurs armées lors de la bataille de l’Aver. Les Peaux-Vertes refluèrent vers la Passe du Feu Noir et pour un temps la paix revint sur cette terre déchirée par la guerre.

UN TERRIBLE AVERTISSEMENT

Les terres du sud étaient en ruines, tous les efforts furent entreprit pour reconstruire les villes et ré-ensemencer les champs. Le peuple populace craignait une nouvelle guerre, mais la paix arrive toujours à faire son nid. On avait espéré que les orques disparaîtraient dans les montagnes, sans chefs et brisés et on les imaginait incapables de revenir troubler les hommes.

Malheureusement, il ne fallut par longtemps avant que des pillards orques n’émergent à nouveau de leurs forteresses montagnardes et fassent couler le sang. Ce fut le vieil allié de Sigmar, le roi nain Kurgan Barbe-de-Fer qui le premier demanda aux hommes leur aide. Les orques se rassemblaient en grand nombre dans les montagnes, menés par le seigneur de guerre connu sous le nom de "Tempête-de-Sang" ["Bloodstorm" en VO]. Ils cherchaient à traverser la Passe du Feu Noir. Les nains avaient des difficultés à repousser la terrible horde, malgré la construction d’un puissant mur pour protéger la Passe. Sigmar était dans son camp près de Nuln lorsqu’il reçu la requête du roi nain. Les orques voulaient venger leur récente défaite, et ils en avaient les moyens.

Sigmar fit mander tous les chefs de tribu en concile. Par la suite, on parla du concile des onze, composé de Sigmar des Umberogens et des Teutogens, du roi Marbad des Endales, du roi Otwin des Thuringiens, du roi Aloysis des Chérusens, du roi Krugar des Taléutes, de la reine Freya des Asobornes, du roi Siggurd des Brigondiens, du roi Markus des Ménogoths, du roi Henroth des Mérogens, du roi Adelhard des Ostagoths et du roi Wolfila des Udoses.

Ces rois tribaux, fiers et indépendants, affrontaient un ennemi unifié contre eux. Sigmar les arriva à les convaincre que le seul moyen de survivre était l’unité. Ils convinrent alors que leurs armées se prépareraient lors de l’hiver, et, une fois le printemps venu, ils marcherait sur les Peaux-Vertes.

LE MARTEAU DE SIGMAR

Au printemps, sur les terres dévastées des Mérogens au sud, se rassembla une armée telle que l’on en avait jamais vu jusqu’alors, et comme on en vit rarement depuis. Les guerriers de toutes les tribus se rassemblèrent sur la plaine de Bloodmoss. Des milliers et des milliers d’hommes et de femmes étaient unis sous le commandement de Sigmar et partageaient un but commun. L’armée fut baptisée « Marteau de Sigmar » et, avec elle, il allait anéantir la menace des Peaux-Vertes.

Les armées de l’époque étaient très différentes de celle d’aujourd’hui. La guerre était alors une part centrale de la vie de tout homme (et, dans certaines tribus, les femmes aussi y était associées). En ces temps sauvages, l’homme combattait les tribus voisines, les orques, les hommes-bêtes et les sombres créatures qui vivaient dans les forêts. Sa vie était brève et sa mort souvent violente ; une mort naturelle était considérée comme un luxe par certains, et comme indigne par d’autres.

Chaque chef de tribu possédait une garde personnelle, composée des plus puissants guerriers de sa tribu, payés et équipés par le chef de guerre. Ils portaient des armures de bronze décorées et des boucliers de fer, des lances, des haches et des épées s’ils pouvaient se le permettre. Ils combattaient parfois à cheval, mais, à cette époque, l’infanterie dominait les champs de bataille. Les chevaux étaient rares et chers et ne commencèrent à être réellement utilisés au combat qu’avec l’invention des étriers et de la lance de cavalerie.

J’ai longtemps admiré les peuples de notre passé pour leurs ressources, leur courage et leur ingéniosité. Certains savants ne décrivent guère nos ancêtres que comme des sauvages habillés de peaux, ce qui était tout à fait inexact. Ils possédaient une riche et vibrante culture artistique. Ils produisaient des bijoux complexes, de la poterie, des tapisseries et de magnifiques armes et armures ciselées de motifs complexes comme des scènes de batailles, de fêtes, de chasses et des figures de leurs sauvages dieux guerriers.

La bière qu’ils brassaient feraient probablement tomber le plus endurci des buveurs actuels. Et si leurs sociétés étaient tournées vers la guerre, c’était à cause du monde dangereux dans lequel qu’ils habitaient.

Mais le plus remarquable est que ces incroyables peuples survécurent. Pour cela, nous leur devons tout.

Quand une tribu marchait à la guerre, le gros de l’armée était composé de bandes de guerriers .Ces soldats formaient des unités soudées car les membres d’une même famille combattaient toujours ensemble. Ces bandes avaient leurs propres bannières et symboles, et juraient allégeance à leur tribu et leur chef de guerre. Leur équipement se composait de grands boucliers de bois et de lances. 

Les guerriers de guède

Il existait de nombreux cultes guerriers à l’époque de Sigmar, fruits d’une société qui acceptait (par nécessité) la place prépondérante occupée par la guerre et le combat dans la vie quotidienne. Ces groupes d’hommes et de femmes pratiquaient leurs étranges techniques de combat et rituels de bataille, qui consistaient en un riche mélange de performance martiale, d’armement inhabituel et de guerre psychologique.
Des groupes de fanatiques dénudés étaient un spectacle commun en ces temps. Leur réputation sur le champ de bataille les précédait, et ils étaient célèbres pour leur habitude à combattre sans rien d’autre sur le dos que des motifs tournoyants tracés à l’aide d’une teinte bleutée appelée guède. Ils enduisaient également leur visage de cendres pour lui donner l’apparence d’un crâne. A la veille de la bataille, ils passaient la nuit à danser autour de brasiers et à marcher sur des charbons ardents pour prouver leur immunité à la douleur.
Ils étaient convaincus que leur dieu guerrier les protégerait durant la bataille. Le port de tout type d’armure (ou même du moindre vêtement) était considéré comme une grave insulte envers leur dieu. Leur apparition sur le champ de bataille, dans toute leur déconcertante nudité, avait un effet profond sur leurs ennemis. Ils portaient des boucliers ornés de pointes à leurs deux extrémités, qu’ils utilisaient pour embrocher leurs opposants.
Les Berserkers étaient une race de guerriers rarissime. Ces hommes brutaux étaient des combattants nés, et la guerre était au centre de leur existence. Ils étaient célèbres pour leur rage au combat, qui les rendait insensibles à la douleur et leur permettait d’ignorer des blessures qui auraient terrassées un homme normal.
Ils atteignaient leur état de rage surhumaine en buvant un élixir, dont les ingrédients ont été depuis longtemps perdus dans les brumes du temps. Comme à leur habitude, ils buvaient l’élixir avant la bataille, utilisant le crâne d’un ennemi vaincu comme coupe, puis dansaient, mordaient leur bouclier, hurlaient et s’invectivaient à tue-tête les uns les autres pour atteindre un état supérieur de fureur. Lorsque leur désir de violence ne pouvait plus être contenu, ils se jetaient sur leurs ennemis, ignorant la peur, la douleur ou la mort. Souvent, la seule furie de leur charge était suffisante pour briser le moral de leurs ennemis.

DÉPLOIEMENT

DéploiementLa décision de s’avancer à la rencontre de l’ennemi était sage et courageuse. En attaquant, vous gardez l’initiative et êtes en mesure de choisir le lieu et l’heure de la bataille. C’est là une maxime que l’on m’avait apprise très jeune, et elle m’a servi sans faillir tout au long de ma carrière. Sigmar était conscient que les orques surpassaient largement son armée en nombre. Nous ne savons pas combien de guerriers combattirent en ce jour fatidique, mais il ne fait aucun doute que ce nombre s’élève à des centaines de milliers. Sigmar mena ses colonnes, longues de plusieurs kilomètres, dans la Passe du Feu Noir. Les tambours résonnaient, les trompettes rugissaient et les hommes criaient et chantaient. Le martèlement des bottes, le battement des sabots et le grondement des roues des chariots résonnaient en écho entre les hauts versants de la vallée. Sigmar voulait que les orques les entendent approcher, et qu’ils sachent que ses hommes ne connaissaient pas la peur.

Sigmar avait choisi le lieu de la bataille avec soin, et il était impératif qu’il l’atteigne et se déploie avant que les orques n’aient le temps de réagir. Cinq kilomètres à l’intérieur de la passe, la vallée se scinde en deux. Juste avant ce point, la vallée se rétrécit et une ligne d’imposants rochers s’étend dans sa largeur. Personne ne sait comment ils arrivèrent là (ils sont encore présents aujourd’hui) mais certains savants pensent qu’ils furent placés là par des hommes préhistoriques en offrandes à leurs dieux. D’autres clament que les dieux les placèrent là pour aider Sigmar dans sa tache. Quoi qu’il en soit, Sigmar réalisa la valeur stratégique de ces rochers et ancra son plan de bataille autour d’eux.

Sigmar devait contrer l’avantage numérique que les orques possédaient. La vallée elle-même, plate et rocailleuse, s’étendait sur un peu plus de trois kilomètres de large. Les versants s’élevaient doucement avant de se dresser, verticaux, sur des dizaines de mètres. La ligne de bataille de Sigmar devait s’étirer d’un mur à l’autre, sans laisser d’espace ou de point faible que les orques puissent exploiter. Les rochers résolvaient plusieurs problèmes.

Les bandes de guerriers formèrent leurs rangs entre les imposants rochers, supportés à l’arrière par les réserves. Leurs flancs étaient protégés par de solides rochers et fractionner la ligne réduisait le risque posé à l’ensemble de l’armée au cas si l’un des groupes de guerriers se débandait et prenait la fuite. Faisant bonne usage des rochers, l’armée s’étira sur toute la largeur de la vallée. Les rochers réduisaient également la surface présentée par l’armée de Sigmar, empêchant ainsi les orques de faire usage de leur supériorité numérique autant qu’ils l’auraient souhaité. Sigmar fit ainsi une brillante démonstration comment utiliser le relief à son avantage. Des catapultes furent déployées à l’arrière des lignes, sur une douce élévation. Les archers furent positionnés devant les machines de guerre.

Là où la vallée s’élevait graduellement vers les falaises escarpées, le terrain était encombré de rochers, d’arbres et de buissons, et ne se prêtait pas au déploiement d’infanterie en rangs serrés. Ici, Sigmar déploya ses tirailleurs : lanceurs de javelots, frondeurs et archers. Le rôle de ces hommes était de déverser une pluie de projectile sur les régiments orques durant leur avancée et d’engager les tirailleurs ennemis qui chercheraient à exploiter les flancs vulnérables de la ligne de bataille principale.

En avant du mur de boucliers, Sigmar plaça ses guerriers les plus féroces : berserkers, fanatiques dénudés, lanceurs de têtes et jeteurs de vessies, cracheurs de feu, étripeurs, harpies hurlantes et les indomptables. A l’avant-garde, il plaça la cavalerie.

Constituant un noyau dur de puissance et incluant la garde personnelle de Sigmar, la cavalerie lourde prit position au centre. Sur la droite se tenaient les chariots de la reine Freya et sur la gauche la cavalerie légère. Il est difficile pour les historiens de deviner le nombre de combattants, mais il est assez certain que la cavalerie de Sigmar comptait plusieurs milliers de guerriers. Cette citation est tirée de la fable épique La Saga de Sigmar, couchée sur le papier en prose, qui illustre avec brio la glorieuse vision constituée par la cavalerie de Sigmar :

« Une grande ovation s’éleva des rangs tandis que les chevaux trottaient avec impatience vers l’avant. Leurs têtes se dressaient, fières et hautes dans la brise qui faisait danser leurs crinières. Les caparaçons scintillants qui couvraient leurs flancs ondulaient, liquides, et le soleil jouait sur les icones des tribus, qui brulaient d’un feu intérieur. Les cavaliers, le dos droit et une ombre sur leur visage, brandissaient bien haut leurs lances et leurs épées en un geste de défiance. La Reine Freya chevauchait à l’avant, les hauts flancs de son chariot brillant de tant de feux d’or et de bronze qu’ils en brulaient les yeux. La vallée tremblait sous les sabots de cinquante mille chevaux.

Le nombre est certainement une exagération, mais la description est probablement exacte. Imaginez la scène ! Elle aurait rempli le cœur de n’importe quel général de fierté.

Le mur de boucliers

Le mur de boucliers est une ancienne formation de bataille, originellement développée avant la naissance de l’Empire et encore utilisée dans certaines régions de nos jours. L’essence de cette formation est simple et est tirée de la phalange mais là où la phalange est une formation mobile, le mur de boucliers est statique. Les fantassins se tiennent en ligne, épaule contre épaule, préférablement dans une position surélevée où leurs flancs sont protégés, et font face à l’ennemi. Les hommes au premier rang juxtaposent et superposent leur bouclier de façon à former un solide mur de bois et de fer. De cette façon, le potentiel défensif du bouclier est utilisé à son maximum, puisque chaque homme bénéficie de la protection du bouclier de son voisin en addition du sien.
Un mur de boucliers bien formé peut repousser des attaques portées par de l’infanterie, de la cavalerie ou des archers. Abrités derrière leur solide mur, les fantassins peuvent attaquer avec leurs lances ou leurs haches, décocher flèches et billes, ou lancer des rochers.
Au sein de l’Empire, le mur de boucliers est rarement utilisé car le style de combat de l’infanterie a évolué. Les tactiques défensives sont désormais moins favorisées et, avec l’arrivée des armes à feu, le bouclier en bois est en passe de devenir obsolète.
Les orques, étant une race primitive, utilisent une version du mur de boucliers. Ils emboitent leurs boucliers durant la charge, abandonnant la formation dans les derniers mètres. Cependant, les orques ne sont pas assez disciplinés pour utiliser cette formation avec la virtuosité et l’aplomb de nos antiques ancêtres.
De nos jours, le mur de boucliers est utilisé avec le plus de succès par les Nains car cette formation est très adaptée à leur style de combat. Les Nains ne sont pas rapides et n’utilisent pas de cavalerie : leur principaux atouts sont leur endurance et leur force. Cependant, engager un ennemi au corps à corps peut prendre du temps et les laisser vulnérables aux projectiles et à la cavalerie ennemis. Un nain vêtu d’une armure solide et s’avançant derrière un mur de boucliers mobile est virtuellement invulnérable et, lorsque la ligne de bataille de l’ennemi est atteinte, son armement supérieur peut tailler dans l’ennemi en toute impunité.

LE HEURT DES ARMÉES

Le soleil éclairait l’un des flancs de la vallée lorsque les orques révélèrent leur présence. Sigmar avait envoyé ses meilleurs éclaireurs en reconnaissance pour déterminer la force et la position de l’ennemi. Aucun ne revint jusqu’à ce que les orques ne les renvoient à leur façon bien spéciale.

La vallée était silencieuse. Seuls se faisaient entendre le cliquètement d’une armure, le renâclement des chevaux et le cri occasionnel d’un seigneur de guerre orientant ses troupes. Puis, au loin, s’éleva un bruit bestial : le son du plus ancien ennemi de l’Homme, avançant en une incalculable multitude. Le piétinement de bottes cloutées, le battement de gigantesques tambours de guerre, le fracas des armes et des armures, les grognements rauques et les mugissements s’élevant de milliers de mâchoires hérissées de défenses, le claquement des roues accompagnant les catapultes tandis qu’elles étaient hissées sur des promontoires rocheux et le craquement du bois et des cordes tandis que leurs bras étaient treuillés en position. Les orques arrivaient, et la terre frémit.

Les orques sont adeptes à distiller la peur dans les rangs de leurs ennemis. Nombreux sont ceux qui considèrent les orques comme de simples bêtes, mais c’est une erreur de les sous-estimer : les bêtes sont rusées et inventives, et ainsi les orques. Ils savent que leur aspect brutal et leur nature bestiale effraient les homes, et ils les utilisent à leur avantage. N’ignorez jamais la menace posée par un orque en le considérant comme un ennemi stupide, ce sera probablement la dernière erreur que vous ferez.

Tandis que la première ligne d’orques s’avançait, leurs catapultes renvoyèrent les éclaireurs de Sigmar. Certains étaient encore vivants lorsqu’ils furent projetés dans les airs, d’autres avaient été démembrés ou brûlés vifs. Les orques sont nés pour se battre, et ils comprennent le caractère paralysant de la peur. De telles tactiques sont destinées à affaiblir le cœur des hommes, et Sigmar en était bien conscient.

Tandis que les orques s’avançaient dans la vallée, leurs rangs s’étiraient d’un flanc à l’autre en un solide bloc. Montés sur des araignées ou des loups, des gobelins se précipitèrent entre les éboulis couvrant les pentes douces de la vallée, impatients d’en découdre et confiants dans leur vaste nombre. Ils firent halte à huit cent mètres des lignes humaines. Tandis que les derniers échos de leur avancée s’amenuisaient et que la poussière soulevée par leur marche retombait en vagues ondulantes, tous les regards se portèrent vers les cieux. Un battement rythmique résonnait dans la brise, comme le battement d’ailes d’un oiseau gigantesque.

Le chef de guerre orque fit son apparition, planant juste au-dessus des têtes de ses guerriers, porté sur une énorme wyvern. Les orques rugirent et martelèrent leurs lances contre leurs poitrines tandis que leur meneur, un orque noir bestial, fit atterrir sa monture sur un pinacle dominant la vallée.

Pour un temps, les armées s’observèrent, comme deux lutteurs prenant la mesure de leur opposant avant le premier échange de coups. Sigmar attendit de voir si les orques allaient avancer. Sur l’avis de son conseil, il avait pris position dans le Nid de l’Aigle : une tour de guet en ruines occupant une langue de roche et offrant un point de vue sur l’ensemble du champ de bataille. Il était sur le point d’ordonner à sa cavalerie d’avancer lorsque ses guerriers les plus sauvages prirent les choses en main.

LA CHARGE DES BERSERKS

Négligeant leurs ordres, les bandes de berserks se précipitent sur l’avant-garde orque.La cavalerie et les chariots de Sigmar leur emboîtent le pas. L’impact des chariots est tel qu’ils traversent la ligne orque et percutent l’arrière de leur force, les mettant en déroute.
Sigmar est victorieux face à la petite avant-garde et le gros de l’armée orque avance. Sigmar et ses guerriers se replient, offrant l’opportunité aux orques d’attaquer la ligne de front.

Les Berserks chargèrent, le cœur débordant de fureur et de haine envers les envahisseurs. Hurlant leur rage bestiale à pleins poumons, ils s’élancèrent en direction de la ligne de bataille orque. Ils s’étaient abreuvés de leur élixir de guerre, et celui-ci brûlait dans leurs veines : quatre cents hommes, dépourvus d’armure, se ruant vers la ligne de bataille orque. Voyant leurs frères de guerre montrer le chemin, les autres hommes et femmes sauvages leur emboîtèrent le pas.

Ignorant la nature de l’adversaire auquel ils faisaient face, les archers gobelins s’avancèrent hors de leur couvert en gloussant, et prirent leurs marques. Ils décochèrent volée après volée. A leur plus grande horreur, pas une flèche ne trouva sa cible : les dieux des Berserks étaient puissants, et, en ce jour, ils protégèrent leurs sujets. Les gobelins firent volte face pour fuir ces hommes impitoyables qui se ruaient sur eux, mais, pris de vitesse, ils furent massacrés par les lames virevoltantes et réduits en pulpe par de lourds marteaux. Le massacre qu’ils infligèrent ralentit à peine les Berserks. Massacrer des gobelins peureux était sans intérêt pour eux : ils cherchaient de la chair orque à trancher.

Le chef de guerre orque avait rassemblé toutes les tribus en une force cohérente, et c’est de ce fait qu’elles posaient une telle menace. Mais les orques sont une race indisciplinée, et même le contrôle du chef orque sur ses troupes avait ses limites. Son avant-garde, voyant les Berserks charger vers eux, ne put résister à l’envie de se mesurer à eux sur la plaine. Des milliers d’entre eux rompirent les rangs et, hurlant leurs cris de guerres inhumains, abandonnèrent le mur de lance pour se ruer à la rencontre des Berserks.

Sigmar donna l’ordre à sa cavalerie d’avancer. « Je veux que les Peaux-vertes aient à gravir une montagne de cadavres de leur répugnante engeance avant même qu’ils atteignent mes lignes, » dit-il tandis que sa cavalerie s’avançait au petit trot.

Une rage animale au ventre, les Berserks et les orques entèrent en collision. La violence de l’assaut initial des Berserks surpris même les orques, qui reculèrent devant tant de fureur. Les fanatiques dénudés bondirent, leur chevelure ondulant derrière eux, leurs lames dessinant des arabesques mortelles autour d’eux, démembrant et décapitant leurs ennemis à une vitesse effrayante. Les lanceurs de vessies jetèrent leurs projectiles corrosifs à la face des orques, brûlant leur visage avant de se jeter sur eux armées de haches. Les Harpies Hurlantes lacéraient tout orque passant à leur portée à l’aide de dagues et de pointes faites de bois de cerf.

Sous les yeux de tous les hommes, orques et gobelins présents, la charge des Peaux-Vertes fut stoppée après quelques instants de violent combat. Certains orques à l’avant des lignes reculèrent, et les hommes se réjouirent à ce spectacle. Mais le chef de guerre orque vit une opportunité de riposter. Les Berserks étaient isolés, loin en avant de la cavalerie, cinquante mètres à peine de sa ligne de front, et ils étaient occupés à achever leurs derniers adversaires et à prélever des trophées sur les cadavres. D’un geste de sa hache, il ordonna aux premiers rangs de sa formation d’avancer en bloc.

Voyant cette nouvelle menace approcher, Sigmar sut que la seule façon de sauver ses hommes sauvages était de faire donner la cavalerie, mais cette dernière se déplaçait trop lentement. Il réalisa que sa place se trouvait à la tête de son armée, pas terré derrière elle à donner des ordres. Avant que ses conseillers ne puissent dire un mot, il enfourcha son cheval et s’élança au grand galop dans la vallée, traversant les rangs de son armée et rejoignant sa cavalerie. L’arrivée de leur meneur gonfla leur cœur et ils accélérèrent leur marche. Les trompettes retentirent et se mêlèrent aux vivats des hommes : Sigmar chevauchait avec eux et face à lui, nul ne pouvait se dresser. 

COMME UNE FAUX DANS LES BLÉS

La charge des orquesSigmar provoque les Orques

1. Les Orques poursuivent Sigmar et sa cavalerie jusqu’aux lignes de front humaines. Un combat sanglant commence, sur toute la largeur de la vallée.
2. Les tirailleurs de Sigmar contiennent héroïquement une large force de chevaucheurs de loups gobelins
3. La supériorité numérique écrasante des orques est neutralisée par la formation en quinconce des alliés et la majorité des régiments orques se masse à l’arrière du combat.
4. Sigmar se jette dans la mêlée : un tournant dans le déroulement du combat.

 

Sigmar cherchait à prendre le contrôle du déroulement de la bataille et à provoquer les orques pour les forcer en avant. Lorsque sa cavalerie percuta de plein fouet l’avancée des orques, il atteint ses deux objectifs.

De nombreux historiens pensent (et les tapisseries qui furent produites par la suite pour célébrer la bataille supportent cette idée) que la Bataille de la Passe du Feu Noir fut l’un des premiers affrontements où une large force de cavalerie utilisa la technique de la lance couchée au combat. Auparavant, les cavaliers utilisaient leurs lances comme projectile ou les tenaient à bout de bras. Cependant, la tribu des Taleuten, constituée de cavaliers émérites, avait inventé l’étrier et la selle relevée, qui amélioraient grandement la stabilité du cavalier. En conséquence, ils développèrent la technique de la lance couchée, tenue à l’horizontale sous le bras, que les cavaliers utilisent depuis. De ce fait, la force d’impact de la lance n’était plus limitée à la force du bras du cavalier, mais concentrait plutôt la puissance de la monture en charge. Sigmar avait ordonné à tous ses hommes d’apprendre cette technique avant la bataille.

L’entraînement paya. Tandis que les orques s’avançaient en lignes ordonnées, boucliers à l’avant et lances baissées, ils n’auraient pas pu prévoir la force dévastatrice de la charge de cavalerie qui allait s’abattre sur eux. Les premiers rangs furent empalés sur les pointes d’acier des lances avant d’être submergés par une marée de sabots. La cavalerie lourde de Sigmar rompit le centre de la ligne orque, inspirée par la soif de sang de leur meneur. Sigmar faisait virevolter son marteau tout autour de lui et les runes magiques gravées sur sa tête brillaient avec éclat tandis que l’arme s’abreuvait du sang des orques. Les chevaux, entraînés à ruer et à piétiner l’ennemi sous leurs sabots, firent s’abattre une pluie de coups sur les orques, brisant leurs crânes et broyant leurs os. Ulric veilla sur ses guerriers, comme il avait veillé sur les Berserks, et les lances des orques glissèrent sur les caparaçons ou se volèrent en éclats sur les boucliers.

Les chevaux de guerre sont entraînés à se battre, pas simplement à charger. J’ai possédé plusieurs chevaux durant mes années en tant que général, et ils furent tous entraînés par feu le grand Ludwig Hoberer. Ma monture favorite, Bess la Brune, était obéissante et douce, jusqu’à ce qu’elle sente le sang et la bataille (la plupart des chevaliers montent des étalons, mais je préférais les juments pour leur tempérament). Elle se jetait au combat sans peur durant la charge et, dans la mêlée, elle ruait et décharnait une pluie de coups de ses larges sabots, visant avec une précision mortelle le visage et le tronc des ennemis. Elle gît, enterrée avec mes autres montures dans le temple de Morr situé dans les jardins de mon manoir.

Les orques subirent un sort encore pire sur le flanc droit. Les chariots de la reine Freya firent leur chemin sur le sol caillouteux de la vallée, leurs faux grinçant, leurs équipages soumettant les orques, de plus en plus nerveux, à un barrage incessant de projectiles. Le grondement des roues cerclées d’acier et les hurlements des conducteurs étaient si déroutants que la ligne de bataille orque commença à se morceler, certains des guerriers tentant de se mettre à couvert derrière leurs camarades. Avec une dernière volée de projectiles, les chariots percèrent la ligne orque où qu’ils frappent. Des jambes furent tranchées au genou tandis que les chariots s’enfonçaient dans la mêlée. La Reine Freya hurlait sa soif de sang tandis qu’elle frappait de gauche et de droite avec ses épées, affûtées comme des rasoirs. Les chariots mirent les orques en déroute en une charge, les piétinèrent tandis qu’ils fuyaient, puis firent volte-face pour s’abattre sur les derniers orques combattant au centre.

L’arrivée des Berserks sonna le deuil de l’avancée orque. Combattant côte à côte, les cavaliers et les hommes sauvages détruisirent l’avant-garde orque presque en totalité, et les rares Peaux-Vertes qui parvinrent à rejoindre leurs lignes furent massacrés par leurs camarades.

Mais l’exultation des guerriers de Sigmar fut de courte durée. Pour la première fois, ils prirent la mesure de l’immensité de l’ost orque. Davantage de guerriers s’avançaient vers eux, si nombreux que les rangs arrières se perdaient dans une tempête de poussière tourbillonnante. Davantage de cavaliers bondissaient de rocher en rocher sur les flancs de la vallée. Les orques et les gobelins se déversaient de chaque caverne et chaque crevasse, comme vomis par la roche elle-même. L’armée orque s’avançait pour l’attaque, comme Sigmar le souhaitait, mais même lui n’avait pas imaginé qu’ils puissent être si nombreux.

Sigmar ordonna une retraite en bon ordre vers le mur de bouclier. C’est là que bataille se jouerait réellement.

UNE MÊLÉE LABORIEUSE

La guerre est rarement glorieuse, rapide ou sans pertes. Le plus souvent, la guerre est brutale, terrifiante et épuisante. Pour remporter le combat, il faut de la force physique, de la volonté, et la résolution de l’action, en particulier dans les affrontements d’infanterie, dépend de celui qui flanchera le premier.

Sigmar déploya ses forces dans une position entièrement défensive. Ils ne pouvaient ni avancer ni reculer sans sacrifier leur avantage, qui reposait sur de gros rochers qui ancraient leur ligne de bataille. Ses bataillons ne pouvaient ni faire usage de leur manœuvrabilité ou de leurs compétences à la charge au maximum de leurs capacités. Par contre, les orques devaient briser la ligne pour l’emporter. Pour cela, ils devaient découvrir un point faible, et y créer une brèche, ou disperser les tirailleurs protégeant les flancs et attaquer à cet endroit. Pour atteindre cet objectif, chaque côté a besoin de remporter la mêlée.

La mêlée est un terme d’infanterie. C’est un nom relativement approprié pour le moment ou deux murs de boucliers se heurtent. Comme les lignes se poussent l’une l’autre, les boucliers s’entrechoquent et se raclent. Les pieds s’enfoncent dans la boue pour trouver une prise. Ceux dans les rangs arrières placent leurs épaules sur ceux de devant, et poussent en avant. Les lances jaillissent, les haches balayent les boucliers, les épées tranchent et coupent. Les visages se déforment sous l’effort. La peau devient luisante sous le sang, la transpiration et les larmes. Les hommes sentent le souffle chaud de l’ennemi sur leur visage. Ils sont forcés de marcher sur les corps de leurs camarades et de leurs parents tombés.

Le général Franzreich savait de quoi ses hommes étaient faits quand il disait « Ah ! Les fantassins. De pauvres diables ! » lors de la bataille du champ de Greinbach. Sigmar savait cela et c’est pour cela qu’il combattit avec eux. Il avait rassemblé les tribus en une armée, et il les menait depuis la première ligne.

Alors que la cavalerie et les hommes battaient en retraite, les orques suivirent. Ils beuglèrent leur fureur à ces impudents humains qui les avaient humiliés. Ils foulèrent les cadavres de leurs morts et leur crachèrent dessus avec méfiance. Les hommes faisaient face à un mur solide d’acier, de bois et de chair verte qui s’étendait d’un côté de la vallée à l’autre. A vingt pas, les orques chargèrent, le visage déformé, les jambes arquées, le bouclier en avant et la lance en l’air. Quand les lignes se rencontrèrent, la vallée trembla comme le bruit d’un orage se fait entendre dans une forêt, les boucliers s’enfoncèrent, les lances se brisèrent, les hommes et les orques mourraient en masse. L’impact fut si grand que la ligne de bataille était prête de céder en de nombreux points, mais les hommes de Sigmar étaient forts, ils soutinrent le choc, poussèrent, puis repoussèrent l’ennemi.

La mêlée commença.

Après la furie des berserks et la charge réussie de la cavalerie, le positionnement particulier et la tactique employée par Sigmar empêchait tout changement ou toute marge de manœuvre. La bataille était fixée aussi bien dans sa configuration que dans son exécution. Les hommes, nains et orques se tenaient pied à pied, poussant, tailladant, frappant, mourant. Le premier côté qui flanchait perdait la bataille.

Le chef de guerre orque rivalisait d’entêtement avec Sigmar. Il vit que ce dernier n’employait pas un plan complexe, comme il avait pu le faire précédemment. Il lui semblait que les humains tentaient de se mesurer à lui dans une démonstration de pure force, coups pour coups. Il fit avancer toutes ses forces et leur commanda de submerger les humains et de les balayer. Les orques étaient plus puissamment battis que les humains et bien plus nombreux. Le chef de guerre pouvait être confiant dans sa victoire.

Lors des batailles rangées du temps de Sigmar, ceux qui attaquaient un mur de bouclier devaient attaquer, puis se retirer, attaquer, puis se retirer dans une tentative de percer la formation. Mais au Col du Feu Noir, les orques étaient si serrés et leurs rangs si profonds, que se retirer pour recommencer une charge était hors de question. Ils pouvaient seulement remplacer ceux de l’avant par des troupes fraîches, quand cela était possible. Les hommes combattant dans une telle situation se fatiguaient en quelques minutes, peu importait leur force physique.

Les balistes situées en retrait de chaque armée faisaient pleuvoir leurs projectiles sur la mêlée, et les catapultes continuaient leur bombardement. Les orques apportaient les corps des morts jusqu’à leurs lance-rocs, et s’en servait de munition ; un autre exemple de la manière dont ils rependaient la terreur et saper le moral de leurs ennemis.

Les minutes devinrent des heures, vers midi, la ligne de bataille n’avait pas bougé. Sur les flancs, là où le sol partait en pente et était recouvert d’amas de roches et d’arbres, les tirailleurs luttaient entre eux. Les chevaucheurs de loup sautaient au-dessus des rochers, pour être ensuite dispersés par un feu nourri des archers embusqués et des javeliniers. La force mixte des tirailleurs des tribus tint en respect une importante force de chevaucheurs de loup ; leur héroïsme sauva la ligne de bataille principale de ce qui aurait pu être une attaque de flanc dévastatrice, si l’infecte cavalerie gobeline avait pu les traverser.

Sur le flanc gauche, les frondeurs Ménogoths et les chiens de guerre avançaient sur une bande d’archers gobelins qui tiraient sur l’infanterie en aval. Cela put sembler une escarmouche sans conséquence, mais quelque chose advint qui inversa la tendance de la bataille.

LA MORT D’UN ROI

Sigmar était un roi guerrier, un général combattant, et il se tenait avec ses hommes là où le combat était le plus âpre. Sa place n’était pas derrière les lignes à donner des ordres, il menait par l’exemple de sa bravoure et de ses prouesses martiales. Son exemple poussait ses guerriers à toujours se surpasser. Où qu’il se tenait, couvert de sang orque, ses yeux luisants et brillants, ses hommes l’acclamaient et combattaient du mieux qu’ils pouvaient pour leur chef bien aimé.

Les avantages de l’attitude de Sigmar était évident, tout comme en étaient les risques. S’il avait été tué, la bataille se serait terminée. Sigmar était le ciment qui avait uni l’armée, et seule sa présence en maintenait la cohésion. Sa perte aurait signifié la ruine de tous ses efforts.

Au milieu de l’après-midi, le bataille était dans une impasse. Les hommes et les nains faisaient payer un lourd tribut aux orques, mais leur ligne n’était pas profonde, et elle se réduisait de minute en minute. Les réserves venaient renforcer la ligne de bataille, mais dparfois certaines sections cédaient, et la cavalerie devait repousser les orques par une charge avant que l’infanterie ne vienne à nouveau combler la brèche. Sigmar observait cela du flanc gauche, qui avait été confié au commandement du roi Markus des Ménogoths.

Marbad avait envoyé un messager pour demander de l’aide car une large force d’archers gobelins se dirigeait sur ses positions, menaçant de submerger ses hommes. Sigmar répondit à l’appel lui-même, accompagné par un contingent de ses gardes du corps. Les gobelins avancèrent sur les hommes, grimaçants et caquetants derrière leurs lances baissées, tandis que ceux placés en retrait décochaient des flèches qui sifflées sur la mêlée en aval. 

Sigmar mena une charge furieuse sur les gobelins, mais avant qu’il ne pût les atteindre, des chevaucheurs de loup fondirent sur eux. Pris par surprise, les humains se débandèrent et beaucoup moururent. Sigmar, seul, tint sa position et cela failli être sa perte ; un peau-verte rusé projeta une poignée de terre dans les yeux de Sigmar et, comme il chancelait, aveuglé, les hordes gobelines se refermèrent sur lui. Avant qu’ils ne purent porter de coup, le roi Marbad s’élança vers eux et les repoussa à lui seul. Alors qu’il se baissa pour aider Sigmar à se relever, une flèche l’atteint au cou et il s’effondra, mort. C’est à cet instant que la légendaire épée d’Ulfshard fut perdue à tout jamais.

Les Menogoths hurlèrent de rage et pendant qu’ils poursuivaient les gobelins, Sigmar sut ce qu’il lui incombait. Il fallait en finir avec la bataille et il était le seul à pouvoir accomplir cela.

DUEL A MORT

Sigmar n’eût-il agi à ce moment, qui sait ce qu’il serait advenu ? La plupart des savants croient que malgré le courage des hommes et des nains, les orques auraient fini par réduire la ligne de défense à peau de chagrin et l’aurait emporté. Le simple poids de leur nombre aurait supplanté les autres facteurs. Mais tel ne fut pas le cas et l’issue de la bataille fut tranchée par les actes surhumains d’un homme : Sigmar Heldenhammer, fléau des peaux-vertes.

Il chevaucha à travers sa ligne d’infanterie vacillante. Il lut l’épuisement sur le visage de ses hommes et la chape de plomb de la défaite peser sur leurs épaules. Il était temps de leur montrer une issue et de stopper la vague sur le point de les emporter. Il était temps d’arrêter le bain de sang.

Sigmar grimpa sur un rocher en trois bonds et, d'un rugissement de défi, il sauta par-dessus ses hommes et atterrit dans les rangs orques médusés. Ghal Maraz tournoya, faisant décoller les orques du sol et broyant leurs os. Les hommes restèrent pétrifiés en voyant leur chef héroïque disparaître devant eux. Les corps des orques qui volaient tels des poupées de chiffon était le seul indice de sa position.

Sigmar voulait-il insuffler du courage à ses hommes ou bien défaire la horde orque à lui tout seul ? Probablement un peu des deux mais qu’il eût anticipé ou même prévu la réponse du chef de guerre orque reste un mystère. Il se mit volontairement en danger pour offrir une cible tentante. Le chef de guerre constata la pile de cadavres autour de Sigmar et il savait certainement qu'aucun homme ne pouvait se battre avec une telle férocité bien longtemps. Il mordit à l’appât, déterminé à tuer Sigmar de ses propres mains.

Le chef de guerre éperonna sa vouivre qui s’élança de son perchoir pour se ruer sur Sigmar. Un cri d’effroi monta des hommes comme le gigantesque orque et sa monture fondaient sur leur roi. Sigmar était alors juché sur un monticule de corps et les orques commençaient à hésiter. Des orques plus massifs que les autres poussaient des congénères plus chétifs simplement pour les voir se faire terrasser par la rage de Sigmar.

Un battement de membranes de cuir alerta Sigmar de l’approche du chef de guerre. La vouivre atterrit et le duel commença. Ils échangèrent de violents coups, mugissant leur haine. Le sort des hommes était suspendu alors que des gerbes d’étincelles naissaient du choc de la hache contre l’épée. La légende raconte que Sigmar dut déposer son marteau tant son manche était poisseux de sang. Sautant sur l’occasion, le chef de guerre tenta un coup fatal, mais avant qu’il ne pût l’abattre, un javelot transperça la gorge de la vouivre. Les hommes des tribus se frayèrent un chemin jusqu’au monticule de cadavres et se jetèrent sur la bête, triomphant d’elle à coups répétés.

C’est alors que Sigmar se dressa au-dessus du chef de guerre accablé et abattit son marteau sur son crâne. La bataille pour la passe du Feu noir était terminée. Sigmar avait fait pencher la balance en faveur des humains.

ÉPILOGUE ET PORTÉE

À l’époque de la bataille pour la passe du Feu noir, le sort des hommes était loin d’être assuré. Les tribus étaient divisées et se battaient entre elles autant qu’avec leurs ennemis communs. Il fallut une menace d’ordre majeur et un meneur ayant la volonté et les moyens d’unifier les tribus et de combattre pour une cause commune pour que notre race survécût. Sigmar eût-il échoué dans cette tâche que l’invasion orque aurait sûrement fait courber l’échine à l’humanité, et la force naissante de notre peuple aurait été tuée dans l’œuf. La portée de cette bataille est tout simplement d’avoir permis la survie de la race humaine et d’avoir semé les graines d’un empire uni.

La décision de Sigmar de rencontrer l’ennemi avant qu’il n’eût atteint ses terres fut cruciale. Elle permit de contraindre les mouvements orques de telle sorte qu’ils ne pussent faire valoir la force de leur nombre, canalisés qu’ils étaient par les parois de la passe. L’avance agressive de Sigmar fut suivie d’une attaque audacieuse avec ses berserks et la cavalerie pour s’assurer que les orques vinssent à lui, là où son infanterie retranchée pouvait soutenir l’assaut.

Cependant, après quasiment une journée de combat, il devenait clair que l’élan de la bataille tournait en défaveur de l’ost de Sigmar. Sa stratégie avait été robuste et il avait utilisé ses soldats au meilleur de leurs capacités, mais la bataille était perdue d’avance ; avec le temps, sa ligne de bataille devait s’effilocher pour finalement rompre. Le tournant de la bataille survint lorsque Sigmar reconnut que la défaite était inéluctabilite et qu’il en renversa le cours en engageant le chef de guerre en combat singulier.

Après la bataille, la renommée de Sigmar traversa le pays et il devint un héros. Il poursuivit les efforts d’unification des tribus autour de lui. Le chemin fut sinueux et Sigmar dut faire face à bien d’autres épreuves, mais en définitive, la volonté de fer dont il fit preuve à la bataille pour la Passe du Feu noir l’emporta. Sigmar est le père de notre empire, né du sang et du sacrifice ce jour dans cette fameuse chaîne de montagnes loin au sud. Gloire à Sigmar, car à lui nous devons tout.