POLITIQUE INTERIEURE
DE MARIENBURG

Marienbourg à vau-l'eau

"Ne punissez pas l'enfant cupide. Faites-en un marchand. La cupidité est la racine des patrimoines."
- Lea Jan Cobbius, expliquant la leçon primordiale apprise par les Marienbourgeois auprès des Grandes Maisons
 
"Marienburg est une cité d'affaires, rien d'autre."
- Directeur Jaan van de Kuypers
 
"Bien sûr qu'il nous faut des Directeurs! Leur réussite elle-même démontre bien qu'ils ont la faveur d'Hændryk. Ce qui est bon pour eux est bon pour Marienburg."
- réponse d'un prêtre d'Hændryk à un étudiant progressiste

 

LE GOUVERNEMENT

Marienburg diffèrent tant du reste du Vieux Monde par la culture qu'il n'est pas étonnant que son gouvernement soit de même différent. Depuis la fin des Barons de Westerland, la cité se passe de monarque : ni roi ni prince ni duc, pas même un baronnet ou deux dans son gouvernement. Afin de pouvoir se décrire aux étrangers, les érudits du Collège de Navigation et Magie Maritime du Baron Henryk ont récemment inventé le terme de " démocratie " qui signifie " règne des masse ". Les Marienbourgeois sont fiers de clamer qu'ils font leurs propres lois et se considèrent, eux-mêmes et leur cité, comme l'exemple éclatant de ce qu'il faut faire. " Quand les petits sont écoutés et que chacun peut s'occuper de ses affaires, tout va au mieux pour tout le monde " assure un proverbe Wastelandais.

C'est en tous cas de cette manière que l'office des visiteurs prétend que les choses fonctionnent. La vérité est, comme toujours, moins brillante, bien plus sombre en tout cas que les " mille lanternes " dont le Staadtholder Buusch se vantait à tout propos. Les Marienbourgeois bénéficient effectivement d'une mobilité sociale plus importante que leurs cousins impériaux, mais la cité est fermement contrôlée par une clique de riches entre les riche. Ceux qui rendent leurs arrêts dans les salons enfumés de la Bourse d'Import-Export n'ont pas plus de considérations pour les " petits " qu'un éleveur pour ses bêtes. Tandis qu'une matriarche hautaine se gorge à Goudberg d'aquavit nordique glacé et de caviar kislévite, une famille crève de faim dans quelques pièces minuscules du Suiddock. On trouve entre les deux tout l'éventail des castes, factions et corporations, des gens qui se sont regroupés entre semblables pour se défendre et qui guettent, tous autant qu'ils sont, l'occasion de grimper un barreau de plus sur l'échelle sociale. 

Le Stadsraad

Le Stadsraad est le bâtiment qui abrite les deux chambres du Parlement wastelandais, dans le quartier de Paleisbuurt. La chambre haute est le Rijkskamer, une assemblée somnolente qui regroupe regroupe tous les prêtres des cultes reconnus, les doyens d'universités et les quelques vestiges de l'ancienne noblesse. Présidée par le Staadtholder lui-même, elle se réunit rarement. La chambre basse, le Burgerhof, est une assemblée turbulente qui accueille les représentants des guildes et les édiles élus par les quartiers de la cité et les principales villes des Wastelands. Elle se réunit plus fréquemment et ses débats sont souvent fort disputés, à coups de poing parfois. Le Président du Burgerhof est Nieut Gyngrijk [Newt Gingrich, ohohoh] (voir p. 127), un démagogue incendiaire particulièrement populaire dans les classes laborieuses. Ce grand requin politique obtient généralement ce qu'il veut des différentes factions.

Officiellement, le Stadsraad a toute autorité pour décider des lois, des commissions d'enquêtes et de la politique du pays. Dans les faits, il ne s'agit que d'un club de débat surdimensionné, d'une simple chambre d'enregistrement pour les décisions du Directorat. Une bonne part de ses pouvoirs législatifs ont été saisis par les guildes qui réglementent elles-mêmes leurs professions et ne sont soumises qu'à de rares enquêtes du Stadsraad. Même les " instructions " formelles que cette assemblée transmet au Staadtholder et aux Directeurs sont en fait dictées par les chefs des divers clans qui gouvernent la ville. Le Secréataire du Stadsraad, Ulric van-den-Bogærde est l'ambassadeur informel des volontés du Directorat auprès des deux chambres et, quand un projet de loi atterrit au Burgerhof, Gyngrijk s'assure habilement que, aussi vivant que soit le débat, les votes ne s'égarent pas. Des cadeaux secrets du Directorat le récompense de ses efforts et il est toujours possible, le cas échéant, de réunir le Rijkskamer qui ne manque jamais de mettre son veto aux mesures désagréables que Gyngrijk n'a pu étouffer dans l'œuf.

"Tous ces jolis coqs veulent chanter dans l'plus joli poulailler. Et c'est le petit peuple qui nettoie les fientes pour sûr. V'voulez de la moutarde avec?"
- Un vendeur de saucisse de hareng marienbourgeois
 
Le Directorat

Le Directorat est le Conseil Exécutif du Stadsraad. Il se réunit chaque semaine pour définir les grandes décisions susceptibles d'affecter la totalité des Wastelands. Ces sessions au Palais Neuf de Paleisbuurt sont ouvertes à tous les citoyens de Marienburg et les enregistrements des débats sont des documents publics. Les décisions sont prises à la majorité, le Staadtholder ne votant qu'en cas d'égalité. Siègent au Directorat les Grands Prêtres de Manaan, Véréna, Shallya et Hændryk, le Recteur du Collège du Baron Henryk et les chefs des dix Maisons Marchandes les plus riches. Leur image publique est celle d'une élite qui défend sans relâche les intérêts des Wastelands dans un monde hostile.

Ce plaisant tableau cache encore une fois des réalités du pouvoirs. Les sièges ecclésiastiques et universitaires sont permanents, mais ceux qui sont détenus par les maisons marchandes sont théoriquement accessibles à tous les membres du Burgerhof, riches ou pauvres. Depuis l'époque de Magnus, ces dix sièges ont pourtant toujours été occupés par les maisons marchandes. Les chefs des dix familles les plus riches emportent systématiquement les élections bisannuelles, les votes nécessaires leur étant assurés par consensus et généreux mécénat. Sauf trahison ou meurtre d'une belle-mère en public, ces chefs de famille ne peuvent perdre leur siège que par un revers de fortune qui altérerait le classement de leur maison. Cette situation suscite bien sûr une compétition effrénée entre les maisons qui se savent proches du pinacle. La plupart du temps, cela se traduit par une (quasi) honnête concurrence commerciale, mais il arrive que certains individus impatients ou peu scrupuleux aient recours à des méthodes moins recommandables pour saboter les affaires du Directeur qui paraît vulnérable.

Le Directorat fait preuve d'une unité stupéfiante car il traite en fait toutes les affaires sérieuses en coulisse. Les initiés considèrent que le Conseil d'Administration, l'assemblée privée des gouverneurs de la Bourse d'Import-Export, constitue le véritable centre de pouvoir de Marienburg. La plupart des Directeurs y siègent et ce n'est pas un hasard. C'est là et dans les luxueux salons des riches entre les riches qu'est réellement gouvernée Marienburg.

"Stupéfiant, n'est-ce pas? Ils dirigent la cité la plus complexe qui soit et leurs réunions sont pourtant des modèles d'efficacité et d'unité. On pourrait croire qu'ils savent à l'avance comment les choses vont se passer, mais ce serait malhonnête."
- Un avocat à la Cour
 

Le Staadtholder

Concession aux nobles maisons de l'Empire (exaspérées par l'idée que la plus riche province impériale puisse être dirigée par des boutiquiers), les Maisons Marchandes de Marienburg ont décidé d'élever un Directeur au poste de Staadtholder pour qu'il assure la régence "jusqu'à ce qu'un héritier véritable de la noble Maison des van de Maacht soit enfin trouvé ". Le Directeur s'assure bien entendu que personne ne puisse jamais satisfaire à ce critère.

Le Staadtholder est élu chaque année parmi les Directeurs et il est toujours issu d'une des dix Grandes Familles. Il préside aux réunions du Directorat et fixe l'ordre du jour, mais son rôle est strictement cérémoniel. Il ne vote qu'en cas d'égalité et, dans les rares occasions où il doit le faire, défend systématiquement les intérêts des Maisons Marchandes. Cette situation satisfait pleinement les Dix et leurs alliés qui veillent toujours à choisir le moins ambitieux et le plus docile d'entre eux pour ce poste. Les avantages matériels considérables attachés à cette fonction, et l'appui qu'elle peut apporter aux intérêts de la Maison du titulaire, expliquent sans doute qu'aucun Staadtholder n'a jamais trahi ses pairs.

Entre autres devoirs, le Staadtholder reçoit les diplomates étrangers et représente les Wastelands lors de diverses cérémonies, comme celle qui ouvre officiellement la saison commerciale. Il est le chef militaire des Wastelands, ce qui lui donne autorité sur les Gardes du Fleuve et de la Cité, les collecteurs d'impôts, les mercenaires et les milices de la cité. Ce commandement n'est cependant qu'une fiction officielle puisque la gestion de ces unités relève habituellement de divers commissaires, capitaines et commandants. Le Staadtholder peut même réquisitionner en temps de crise les milices et les flottes privées des temples et des Maisons Marchandes de la cité, même si ce pouvoir n'a plus été utilisé depuis la guerre d'indépendance. Il est aussi prêtre d'Hændryk et de Manaan, des titres strictement honorifiques bien sûr.

"Van Ræmerswijk est le Staadtholder idéal. Il laisse le Directorat s'occuper des affaires pendant qu'il veille à son image dans les bals et les parades."
- Directrice Clotilde de Rœlef

Le Staadtholder détient pourtant un réel pouvoir, un pouvoir qu'un homme, ou une femme, sans scrupule pourrait utiliser pour régner en maître sur le Directorat, et donc sur Marienburg. Dans une pièce latérale qui n'ouvre que sur son bureau, siège son secrétaire permanent officiellement appelé Intendant du Palais. Il s'agit en fait du chef des services secrets marienbourgeois, les Marcheurs de Brumes. Le rôle réel de cet homme apparemment tranquille et modeste est rarement connu à l'extérieur du Directorat : rassembler des renseignements et agir en secret contre toutes les menaces intérieures et extérieures. Il entretient un important réseau d'espions et d'informateurs dans tout le Vieux Monde et à Marienburg même, un réseau qui s'infiltre, dit-on, jusque dans les résidences des Directeurs. L'Intendant du Palais rend compte chaque jour au Staadtholder. Dans une cité de marchés secrets, les renseignements valent de l'or et plus.

Les départements et les commissions mineures

La gestion quotidienne de la cité génère un flot de problèmes insignifiants d'une telle ampleur que le Directorat et le Stadsraad pourraient fort bien s'y noyer. Il existe heureusement un corps admirablement conçu pour la gestion des détails : la bureaucratie.

Représentants exemplaires d'une cité bâtie au milieu des marais, les bureaucrates s'activent dans un marécage de commissions, chambres, offices, guildes, départements et conseils de toute taille et importance. Leurs juridictions s'entrecroisent et se contredisent à plaisir, mais tous s'accordent sur la nécessité du sacro-saint certificat en triple exemplaire. Certaines de ces administrations sont si anciennes que leur justification initiale est presque oubliée de tous, et le labyrinthe réglementaire qui en résulte a suscité la création d'un corps d'avocats entièrement voués au conseil administratif, des avocats qui n'ont pas honte de leurs honoraires.

Les bureaucrates savent défendre avec brio leurs budgets respectifs devant les commissions du Stadsraad (qui alimentent quantité de sinécures distribuées aux parents et amis) et la disparition d'un poste au nom de l'efficacité constitue donc un événement rarissime. Les Marienbourgeois se montrent partout bons nageurs et réussissent donc généralement à traverser le marigot bureaucratique sans autre perte que quelques pots-de-vin judicieusement distribués (le terme habituellement employé est " donation au club des anciens du bureau ").

Le Département de Santé Publique dans le Quartier du Temple est une création récente, le dada de Sœur Annelœs van de Maarel, la Grande Prêtresse de Shallya. Sous la direction du Dr Anders Vesalion (voir p. 94), cette administration soutient l'étrange idée que les eayx sales des canaux et les insectes favorisent les épidémies. Ses finances non négligeables sont pour une bonne part distribuées à de pauvres gens qui s'activent, en échange, à écrémer les canaux de leurs ordures. Le " râteau à merde ", un sobriquet décerné par la Guilde des Médecins (qui n'apprécie guère qu'on cherche à éradiquer sa principale source de revenus), souhaite aussi améliorer la santé des pauvres du Suiddock et leur apprend à faire bouillir leur eau, sans grand succès jusque-là. Ce département est, de même, à l'origine de nombreuses plaintes à l'encontre du Quartier Elfe qui utilise régulièrement de petits élémentaires d'eau pour filtrer ses canaux et expulser les déchets dans le reste de la cité. Le Directorat se désintéresse totalement de ce service, mais son manque de tact lui a déjà gagné de puissants ennemis qui comptent bien réduire son budget à la portion congrue dès la prochaine session du Burgerhof.

Le Commissariat aux Travaux Publics et Réclamations est responsable de l'entretien des canaux, digues et jetées. Dirigé par le Nain Waltonius Joken Fooger, un cousin du Directeur Fooger, ce service finance d'importants contrats avec les architectes et les guildes d'ouvriers de la cité. Malgré les dénégations outragées du responsable des relations publiques du Commissariat, tout le monde sait que le Commissaire Fooger accorde toujours sa préférence au meilleur enchérisseur sous la table (on le surnomme généralement " Barbe d'Or " en son absence).

Les conseils municipaux

Pour un homme d'affaires, le réseau inextricable tissé par les dizaines d'administrations byzantines se complique encore d'un effet secondaire des principes égalitaires wastelandais : une prolifération de conseils municipaux. Chaque quartier a le sien, élu par acclamations. Les citoyens respectables qui les composent sont chargés de collecter les fonds qui financent les postes de Gardes locaux, les Coiffes Noires et les arbalétriers de la milice.

Ces conseils ont toute autorité pour édicter des arrêtés destinés à " maintenir l'ordre public ". Rarement contrôlés, ils accumulent depuis des siècles des montagnes de réglementations mesquines, obsolètes et contradictoires. Variables d'un quartier à l'autre et bien souvent oubliés immédiatement après leur enregistrement, ces arrêtés prétendent réglementer la vie quotidienne, depuis le comportement en public (les mendiants d'Oudgeldwijk ne peuvent proférer qu'une seule insulte à qui leur refuse l'aumône) au commerce local (les citoyens de Remas et Miragliano ne sont pas admis dans les mêmes tavernes de Kruiersmuur pour cause de bagarres trop fréquentes).

"Eh bien les gars! Des bouffantes rouges? … de la publicité! Je me fiche que ce soit légal à Winkelmarkt! Ici à Noordmuur, il n'y a que des gens respectables et la loi dit que ça restera comme ça! Vous êtes bon pour une amende de deux guilders par tête de pipe, et après, vous irez vous changer vite fait!"
- un Garde de quartier mal luné

Ces règlements ne sont généralement invoqués que par un Garde ou un fonctionnaire à qui la tête d'un " contrevenant " ne revient pas. Ils lui permettent alors de lever une amende à paiement immédiat (de 1 shilling à deux guilders) qui, en cas de contestation, se transforme souvent en procès-verbal pour " résistance à autorité " ou " trouble à l'ordre public ", d'où une amende plus importante ou une journée de pilori ou un passage à tabac. Ces amendes finissent plus souvent dans la poche du garde que dans la caisse du conseil concerné, mais ce genre de choses n'offusque (sincèrement) personne à Marienburg.

LES GRANDES FAMILLES

Bien avant les Incursions du Chaos, marchands, négociants et capitaines étaient les véritables dirigeants de Marienburg. Ayant organisé la résistance aux armées de L'Anguille, ils avaient alors exigé une part du pouvoir officiel et l'avaient obtenu. Avec le temps, ce pouvoir n'a fait que croître. Ils ont tout d'abord contrôlé les barons par leurs dettes, puis convaincu l'Empereur de leur accorder le pouvoir pour finir par l'envoyer se " faire voir sur la Lune du Chaos ". A l'époque de l'indépendance, les plus puissants d'entre eux étaient déjà connus comme les Maisons Marchandes, les Grandes Familles ou simplement les Dix.

L'entrée dans ce club extrêmement fermé n'est soumise qu'à un seul critère : la richesse. Marienburg abrite des dizaines, peut-être des centaines d'entreprises mercantiles, mais seules les plus riches peuvent rêver d'un siège au Directorat ou au Conseil d'Administration de la Bourse. Aucun barème précis n'a jamais été déterminé; il suffit que les Directeurs et certains autres initiés remarquent qu'une Maison est sur le déclin alors qu'une autre gagne en importance. Cette autre peut même être en partie responsable de la déchéance de la première. Tout ce qui n'est pas trop ostensible ou violent est acceptable. Quand le postulant a suffisamment démontré sa détermination, son sens des affaires et son acceptation des règles du jeu, le Burgerhof donne le coup de grâce à la Maison déclinante et le nouveau venu la remplace au Directorat, quand il ne s'empare pas aussi de sa maison, de ses comptoirs étrangers et de sa milice privée.

Une place parmi les Dix ne sonne pas pour autant la fin de la compétition. Chaque Maison a ses propres intérêts et leurs rivalités intestines, pour encore plus de richesse et encore plus de pouvoir, peuvent être féroces, voire entachées de violence. Chacun sait bien que Marienburg ne peut prospérer que dans la paix et la stabilité, mais cela ne les empêche pas d'employer des espions pour dénicher les secrets de leurs rivales, des criminels pour les sabotages et les cambriolages, voire, comme le prétendent les rumeurs, des pirates et naufrageurs pour détruire les actifs maritimes de leurs concurrentes. Il arrive aussi qu'elles aient recours à l'assassinat, mais une mesure aussi extrême ne frappe généralement que de moindres subordonnés. Les Directeurs craignent sans doute que ce type d'action ne dégénère en vendetta et l'exemple du chaos tiléen donne à réfléchir.

"Les Dix? C'est tout simple mon ami. Ce sont les requins à qui on a confié la garde des sardines."
- un aubergiste du Suiddock

Il ne faut pas pour autant conclure à un état de guerre entre les Grandes Maisons, loin de là, ou même les Maisons, vont et viennent entre l'ombre et le soleil, mais leur esprit de corps reste intact. Tous sont des hommes d'affaires : c'est par leur capacité à déterminer leurs besoins respectifs et un marché satisfaisant pour tous qu'ils maintiennent leur emprise sur le pouvoir. Les mariages entre pairs et les libéralités distribuées aux serviteurs loyaux tissent un filet d'ententes et d'obligations qui incite une bonne part de la population de Marienburg au statu quo. Les autres Directeurs, les maisons mineures, les guildes et même les Elfes ne manquent pas de réclamer leur part du gâteau, mais ce sont les Dix qui tiennent fermement les cordons de la bourse, et tel a toujours été le cas depuis l'entrevue historique avec Magnus le Pieux.

La Maison van de Kuypers

Cette Maison est de loin la plus riche et la plus puissante des Dix. Ses menées d'affaires brutales et déterminées lui avaient taillé un accès vers le pouvoir bien avant l'indépendance et elle a remplacé la Maison Winkler au Directorat après la chute de celle-ci en 2351 C.I. Les Marienbourgeois racontent encore comment le vieux Kuypers a jeté le Grand-père Winkler et toute sa famille dans les canaux après que Winkler eut perdu sa chemise dans l'affaire des triperies ostlandaises. Ce dernier, un des fondateurs du Directorat, avait fini ses jours en ivrogne dans le Suiddock.

Le chef de famille est Jaan van de Kuypers, 57 ans. Il passe pour être l'homme le plus riche du monde et il a pris la tête de la famille après que son frère aîné, Bertold, eut massacré ses parents et sa sœur dans une crise de démence. Jaan van de Kuypers compte au nombre de ses amis personnels le Tsar de Kislev, le Roi de Bretonnie, le Sultan d'Arabie et même l'Empereur Karl Franz et les Électeurs. Tous lui doivent de l'argent. Il est le véritable chef du Directorat : son réseau d'obligés et de contacts lui assure un bloc de huit votes. Les Maisons van Ræmerswijk, van Scheldt, den Euwe et Rothemuur lui sont alliées et, parmi les sièges perpétuels, les Grands Prêtres d'Hændryk et de Véréna apprécient ses donations cultuelles. Le Recteur du Collège Henryk est son cousin. Jaan van de Kuypers n'a jamais perdu un vote du Directorat et certains craignent qu'il n'en fasse un jour un simple spectacle de marionnettes.

Sa famille est celle des Dix qui couvre le plus vaste éventail d'intérêts, des intérêts qui vont des spéculations sur le blé averlandais jusqu'aux ressources médicinales de Cathay. Jaan van de Kuypers s'intéresse personnellement au commerce lustrianien. La résidence familiale se situe dans le Goudberg et se trouve quasiment reliée au Palais Neuf. Ses armes carmins arborent trois figures l'une au-dessus de l'autre, de haut en bas : un poing, une pièce d'or et une plume d'oie.

La Maison van Onderzœker

Thijs " Le Moindre ", 27 ans, a pris la tête de cette famille après la mort soudaine de son père, Rembrand van Onderzœker, retrouvé flottant sur le canal Suiddock. L'enquête officielle a conclu à la noyade de ce patriarche après une nuit de lotus noir, mais Thijs refuse cette version et prétend que son père n'a jamais rien consommé de plus fort qu'un verre de porto après le dîner. Il s'est gardé de faire la moindre accusation publique, mais les rumeurs ont flambé quand il a refusé de serrer la main du Directeur Leo van Haagen à la dernière cérémonie du Serment à Manaan lors de l'ouverture de la saison commerciale.

Les van Onderzœker sont surtout impliqués dans le commerce continental et leurs activités se concentrent essentiellement dans l'intérieur de l'Empire, Kislev, Norsca et la Bretonnie du nord. Ils se montrent particulièrement agressifs dans les villes minières et les fiefs nains du Reikland occidental où leurs agents cherchent sans cesse à contourner les intermédiaires pour traiter directement avec les producteurs. Ces dernières années, ils ont laissé une petite fortune dans une série de procès trop souvent perdus contre les entrepreneurs lésés, le plus long et coûteux étant celui qui les a opposé à une branche cadette des van Haagen à Bögenhafen.

La Maison van Onderzœker n'est en fait plus ce qu'elle était, le père de Thijs n'ayant pas hérité du sens des affaires proverbial de la famille. Elle est lourdement endettée et ses actifs ont pour une bonne part été hypothéqués afin de couvrir les frais de justice et de défrayer les investisseurs qui l'ont épaulée dans certaines entreprises malheureuses. Les efforts de Thijs pour redorer son blason en intensifiant ses activités avec les Nains du Reikland lui ont coûté l'alliance des Fooger. Sa Maison est toujours alliée à celle des van den Nijmenk, mais nombreux sont ceux qui doutent que le jeune Thijs ait les compétences politiques et financières nécessaires pour que sa famille conserve son siège directorial. La résidence familiale se trouve à Guilderveld. Ses armes azur arborent deux tridents croisés sur un navire marchand.

La Maison de Rœlef

Clotilde de Rœlef, 47 ans, est le seul Directeur du beau sexe, hormis la Grande Prêtresse de Shallya. Elle est aussi la matriarche de la famille de Rœlef, la seule lignée noble des Wastelands qui a réussi à conserver sa prééminence dans la ploutocratie. Elle et sa famille au sens large continuent de vivre dans l'antique résidence d'Oudgelwijk et les de Rœlef sont les portes-parole de facto des héritiers de la vieille noblesse qui vivent là en pauvres gentilshommes. Elle n'est pas mariée et repousse sans ménagement tous ses prétendants, Jaan van de Kuypers y compris. Elle a désigné comme héritière sa nièce, Clara de Rœlef, 15 ans, qui ne se déplace jamais sans son garde du corps arabe Hakim. Femme d'affaires coriace et terre-à-terre, Clotilde a gagné son siège au Directorat il y a 14 années de cela, quand la Maison Akkerman a été emportée par le scandale, ses membres seniors ayant été dénoncés comme sectateurs de Slaanesh.

Les de Rœlef sont spécialisés dans les importations de luxe, d'Arabie, de Tilée et d'Estalie, et exportent les tissus et liqueurs de l'Empire ainsi que les dentelles des Wastelands. Ils entretiennent un important réseau de contacts dans leur zone d'activité et Clotilde compte plusieurs rois estaliens et seigneurs arabes au nombre de ses amis. A Marienburg, les de Rœlef essaient de garder les meilleures relations possibles avec les autres membres du Directorat, à l'exception de Jaan van de Kuypers pour lequel Clotilde cache mal son mépris. Elle est une amie d'Arkat Fooger et songe à le rejoindre dans sa nouvelle affaire d'assurance. Les armes de sa famille arborent un griffon noir sur fond blanc, la patte posée sur une bourse.

La Maison van Haagen

La Maison de Leo van Haagen, 67 ans, est la deuxième fortune des Dix. La résidence familiale est à Goudberg, à la limite de Cathay-ville. Ses armes arborent des chevrons blancs et bleus, sans autres motifs. L'héritier de Leo est son fils Crispijn, 35 ans.

Les van Haagen, comme les van Onderzœker, concentrent leurs activités au nord du Vieux Monde et se trouvent donc souvent opposés à cette famille. Ils s'occupent de toutes sortes de marchandises, des articles de luxe aux objets quotidiens. Le " vieux Leo " dirige sa famille d'une main de fer. Ses cousins, neveux et nièces sont dispersés dans nombre de cités où ils veillent aux intérêts familiaux, le patriarche faisant plus confiance aux liens du sang qu'aux pourcentages consentis aux agents. Les différents chefs de comptoirs sont autorisés à exploiter indépendamment les spécificités du marché local, mais Leo leur envoie régulièrement des instructions écrites fort détaillées et malheur à celui qui laisse son bénéfice diminuer.

Aux yeux de certains observateurs avertis, la fortune des van Haagen paraît cependant supérieure à ce que devraient dégager leurs entreprises. La famille, jusqu'au moindre subordonné, semble avoir pris la dépense ostensible pour symbole. Selon certaines spéculations, les van Haagen seraient plus impliqués dans la contrebande que la moyenne des Directeurs. Ils se seraient même débrouillés pour faire interdire telle ou telle marchandise afin d'accroître leur profit par le marché noir.

Les rumeurs les plus sournoises, des murmures échangés au coeur de la nuit dans les tavernes du Suiddock, vont jusqu'à impliquer que le jeune Crispijn van Haagen, surnommé le " coq de concours " pour ses goûts décadents et dispendieux, dans l'illégale mais lucrative " traite des corps ", le trafic d'êtres vivants destinés à l'esclavage ou à l'autel sacrificiel. La chose est peut-être vraie, ou pas : rien de tel n'a jamais été prouvé en tous cas.

La Maison van Scheldt

Les van Scheldt ont installé leur quartier général dans un complexe fortifié à l'extrémité est, la plus récente, du Suiddock. Les misérables taudis alentour ne font que souligner l'opulence de cette maison et la proximité de " cette bande de dégénérés et canailles " maintient le patriarche avare des van Scheldt dans une terreur constante. La paranoïa de Wessel van Scheldt est telle qu'il fait patrouiller en permanence son enceinte extérieure blanchie à la chaux par une escouade de sa milice privée accompagnée de chiens. Des gardes du corps armés fouillent systématiquement les sacs et paniers des serviteurs qui viennent travailler, et peu importe leurs années d'ancienneté. Le patriarche a maintenant 80 ans et nul ne le voit jamais dans les rues du Suiddock. Il préfère utiliser la barque de parade amarrée dans son anse privée au cœur de la résidence. Ces derniers temps, il n'est de toute façon sorti de chez lui que pour se rendre aux réunions du Directorat.

La Maison van Scheldt tire une bonne partie de ses revenus de la flotte de pêche de la cité. Nombre de pêcheurs se sont endettés auprès de cette Maison quand ils n'en sont pas devenus les employés après avoir été mis en faillite. Ils sont tenus de vendre leurs prises au-dessous du cours du marché aux conserveries van Scheldt. Le poisson est alors nettoyé et saumuré pour être vendu dans l'Empire et Kislev, ou broyé et transformé en liquament, une sauce fréquemment utilisée dans les cuisines tiléennes et estaliennes. Un de ces pêcheurs a d'ailleurs bien failli réussi à tuer le vieux Wessel il y a quelques années et c'est depuis que sa suspicion naturelle a dégénéré en paranoïa.

Wessel n'a ni héritier ni parent proche, même si l'on dit qu'il pourrait bientôt adopter le seul homme à qui il manifeste une certaine confiance, son premier comptable Rudolph Blaak. Sa Maison est alliée à celle des van Kuypers, Ræmerswijk, den Euwe et Rothemuur, mais les soupçons obsessionels de Wessel le tiennent à distance des autres Directeurs et son influence décline. Les armes de la Maison van Scheldt arborent une tête de sanglier posée sur un tonneau sur fond vert.

La Maison van Ræmerswijk

On pourrait penser que la famille du Staadtholder est certainement la plus puissante des Dix. Ce n'est, la plupart du temps, pas le cas. Luitpold van Ræmerswijk, 62 ans, a été décrit comme un " vieux morse ", une image plus inspirée par sa corpulence et son impressionnante moustache que par son agressivité en affaire. Ses dégustations de bordeaux estaliens (chaque jour dès le petit-déjeuner) et ses devoirs de représentation (et plus particulièrement les bals où il peut danser avec de jolies femmes) suffisent à remplir sa vie, et c'est bien parce qu'il ne risquait pas de menacer les intérêts des autres Directeurs qu'il a été élu Staadtholder.

La résidence familiale se trouve à Goudberg, mais le Staadtholder lui-même préfère vivre au Palais Neuf où il aime à organiser d'extravagants dîners et autres dégustations de vins. La Maison van Ræmerswijk dirige elle-même fort peu d'entreprises. Elle préfère prendre des participations dans des affaires gérées par d'autres, renonçant volontiers aux responsabilités et au travail en échange d'un bon retour sur investissement. Son attitude au Directorat est empreinte d'une telle passivité qu'elle a été rebaptisée " Ræmerkuypers " pour rappeler que tous les votes décisifs de Luitpold ont favorisé Jaan.

Les armes de la Maison van Ræmerswijk arborent une pièce d'or sur un navire, le tout sur fond noir. L'héritier de cette Maison est Anton von Ræmerswijk, un dandy de pacotille qui passe le plus clair de son temps sur de petits voiliers de vitesse dans la baie.

La Maison Fooger

Encore vif et alerte malgré ses 177 ans, Arkat Fooger est le membre du Directorat le plus âgé et aussi le plus ancien, puisqu'il a obtenu son siège l'année qui a précédé la Guerre d'Indépendance. La Maison Fooger est le porte-parole naturel de la petite communauté naine de Marienburg et des quelques mineurs nains qui s'activent encore dans les collines à l'ouest des Landes Amères, un rôle traditionnellement dévolu dans d'autres cités à la Guilde des Enginieurs Nains. Arkat Fooger est d'ailleurs le seul Directeur non-humain et en tant que tel il veille aussi sur les intérêts des communautés gnomes et halfelings. Il est devenu le protecteur de facto de toutes les communautés étrangères, des Cathayois et Indiens aux Bretonniens en passant par les Rats des Canaux, ces équivalents flottants des Gitans. La Maison Fooger, après des décennies de prudentes manœuvres, peut compter sur un puissant réseau de contacts et d'alliés, des appuis d'ailleurs bien souvent méprisés par les Wastelandais de souche. Si le Directorat devait un jour se trouver poussé dans ses derniers retranchements, Arkat Fooger pourrait bien surprendre son monde par la puissance de son arrière banc.

La Maison Fooger n'entretient pas de grands réseaux de comptoirs à l'étranger, même si ses relations avec les fiefs nains des Montagnes Grises et du Bout du Monde sont bien sûr excellentes. Non seulement elle achète le produit de leurs mines, mais elle est aussi leur principal fournisseur pour tous les articles de luxe ne pouvant être produits sous une montagne. Elle contrôle en outre les contrats de travaux publics à travers la commission dirigée par l'avaricieux cousin d'Arkat, Barbe d'Or. Cette situation l'a amené à se rapprocher de Lea Jan Cobbius, chef de la Guilde des Débardeurs et Charretiers, une des guildes d'ouvriers les plus puissantes de la cité. Les nombreux entrepôts Fooger du quartier des docks ne manquent ainsi jamais de main-d'œuvre et les pauses café sont réduites au minimum.

Ces deux dernières décennies, la Maison Fooger a littéralement inventé l'assurance. Plutôt que d'acheter et de vendre lui-même des marchandises, le clan Fooger offre de rembourser les armateurs et marchands en cas de perte de leurs navires ou de leurs marchandises, et ce, quelles que soient les raisons. En échange de cette garantie, la Maison Fooger reçoit de ses clients des paiements modestes mais régulièrement renouvelés. Ce service est désormais fort recherché et les assurés n'hésitent plus à perdre un peu d'argent pour se garantir contre la ruine. Une série récente pertes maritimes a cependant sévèrement ponctionné les caisses Fooger et Arkat recherche désespérément l'alliance des de Rœlef. Quelques autres gros remboursements pourraient l'acculer à la faillite. Il soupçonne d'ailleurs que la malchance n'est pas l'unique responsable de cette situation et s'est prudemment mis en quête de quelques agents à la fois dignes de confiances et sacrifiables pour y mettre fin.

La résidence familiale des Fooger se trouve dans le quartier nain et ressemble plus, avec ses énormes pierres de taille et son donjon hexagonal de six étages, à un fort archaïque qu'à une maison moderne. Arkat a récemment désigné comme son héritier le jeune Rœnekaat Fooger, d'où certaines tensions dans la famille puisque Waltonius Barbe d'Or espérait bien diriger le clan un jour ou l'autre. Pressé de s'expliquer sur son choix, Arkat aurait simplement bougonné quelque chose comme « ...autant confier la garde d'un cimetière à une goule ". Les armes de la Maison Fooger arborent une rose blanche sur fond bicolore, rouge sur bleu.

La Maison van den Nijmenk

Sasha van den Nijmenk, 43 ans, ne voulait pas vraiment être un Directeur. Il aurait de loin préféré sillonner la Mer des Griffes pour inspecter les propriétés de sa famille en Kislev et Norsca, ou même diriger des expéditions d'exploration au cœur de ces pays comme il le fit dans sa jeunesse. Il est malheureusement le dernier de sa lignée et personne ne pouvait le décharger du fardeau de ses responsabilités.

Dépourvu d'héritier, il s'est résigné à rester à Marienburg afin de veiller aux intérêts de sa famille et de chercher une épouse convenable. Mais chaque nuit, il entend l'appel du large et s'éclipse souvent pour barrer en solitaire son bateau personnel sur la Manaanspoort Zee.

Comme les autres Dix, la Maison van den Nijmenk assure toutes sortes de services bancaires. La rumeur affirme que le Grand Duc de Middenland en particulier devrait des sommes énormes à Sasha. Les fourrures, l'ambre, les gemmes et autres productions spécifiques de Kislev et Norsca contribuent en priorité à la fortune de la famille. Celle-ci s'est rendue célèbre par les merveilleux articles ramenés de ses expéditions, nombre d'entre eux s'étant vendus à des prix fabuleux. Alors qu'il cherchait en vain le mythique fief nain nordique de Karaz Krogmort, Sasha est tombé sur une petite fortune, un antique planétaire des Hauts Elfes aux rouages d'or et planètes de cristal. Acheté par le Collège du Baron Henryk, cet appareil a soulevé de nombreuses controverses érudites : il représente en effet le soleil, les planètes et Mannslieb, mais aucun cristal n'y symbolise Morrslieb, la lune du Chaos. Le planétaire serait donc pour certains antérieur au Grand Désastre, alors que d'autres considèrent qu'il ne s'agit que d'une farce des Nains nordiques et d'un gaspillage d'argent de la part du Collège.

La résidence familiale se situe à Goudberg, et le personnel de maison presque exclusivement recruté dans le ghetto indique tout proche. Les armes de cette Maison arborent un champ de coquilles St-Jacques bleues et jaunes tête-bêche. La milice privée des van den Nijmenk sort de l'ordinaire puisqu'elle est presque entièrement formée de Kislévites inféodés à la famille maternelle de Sasha. Tous sont d'une loyauté sauvage et se montent plutôt butés et moroses en dehors de leurs visites aux tavernes locales, qu'ils remplissent alors de leurs chants tout en vidant la cave. En ces occasions, seule la Garde peut les convaincre de mettre fin à leur fête. Des batailles d'ivrognes s'ensuivent inévitablement et Sasha a dû créer une caisse spéciale pour régler les cautions et poursuites en dommages et intérêts.

La Maison den Euwe

La Maison den Euwer est installée dans dans l'Handelaamarkt, devant le pont Lune Verte qui donne sur le quartier nipponais. Sa résidence, comme souvent chez les gens riches, renferme une anse privée.

La décoration de celle-ci reflète les intérêts orientaux de cette Maison et s'entoure d'un écrin de saules pleureurs et de cerisiers à fleurs. Des statuettes de dieux nipponais ou cathayois montent la garde au sommet des piquets d'amarrage. Tout est calme est tranquille, une reposante oasis au cœur de cette cité frénétique. Les armes de la Maison den Euwe arborent dans un ovale de jade le caractère nipponais signifiant prospérité, en blanc.

Dirigé par Karl den Euwe, 59 ans, la plus petite Maison des Dix a bâti sa fortune dans le commerce des gemmes, métaux précieux et ingrédients alchimiques rares. Dans le comptoir fortifié et lourdement gardé qui jouxte la résidence, les den Euwe vendent diamants, or, rubis, jade, poudres et liqueurs dotées de propriétés occultes; une immense fortune transite chaque année par leurs coffres. Aussi modeste que soit cette Grande Maison, ses affaires lui assurent un contact privilégié avec tous les riches et puissants du continent. L'étincelante cour de la Grande Comtesse Emmanuelle Liebwitz de Nuln en est le meilleur exemple car nul n(y songerait à acheter ses diamants ailleurs qu'à Marienburg. Les favoris de la fortune qui achètent l'or et les joyaux comme d'autres des bonbons ne sont d'ailleurs pas les seuls contacts de cette Maison; nombre de sorciers et d'alchimistes ne pourraient poursuivre leurs recherches s'ils se voyaient privés des articles qu'elle vend. Les den Euwe entretiennent des relations suivies avec moult sorciers de Marienburg dont les Sorciers d'Or du Collège Henryk, naturellement.

Même s'il appartient au bloc dirigé par Jaan van de Kuypers, Karl den Euwe juge que la puissance de ce dernier a désormais atteint un tel niveau que l'équilibre des pouvoirs est menacé. Sans empressement ni imprudence, il s'est approché des Fooger, van den Nijmenk, de Rœlef, van Onderzœker et du Culte de Shallya. Ses plans sont encore vagues, mais il souhaite créer une sorte de contrepoids aux van de Kuypers avant que " nous ne devenions tous les valets de pied de Jaan ". Il s'est même résigné à transférer secrètement des fonds à Thijs van Onderzœker pour que ce dernier puisse régler ses dettes les plus urgentes, des fonds d'ailleurs accompagnés de solides conseils.

Mais ses efforts risquent fort de ne pas aboutir. Son héritier est Egmond den Euwe, le fils de son épouse nipponaise, Dame Katsi Okumoto. Au cours de sa première aventure commerciale dans les Terres du Sud, du Nippon à Cathay, Egmond s'est converti : il est maintenant un adorateur enthousiaste du Seigneur Tsien-Tsin, plus connu dans le Vieux Monde sous le nom de Tzeentch.

La Maison Rothemuur

La résidence Rothemuur, au centre de Goudberg, est un fastueux palais construit dans le style tiléen, décoré de marbres pastel et de fontaines sophistiquées. Les armes de la Maison montrent trois points rouges sur fond jaune. Dirigée par Maximilian Rothemuur, 66 ans, celle-ci se concentre dans le commerce avec l'Arabie et le Nouveau Monde. Le premier marché en fait une concurrente directe des de Rœlef alors que le second est exploité en partenariat avec les van de Kuypers. Les Rothemuur entretiennent aussi d'excellentes relations avec les Elfes des Mers et nombre des précieuses marchandises du Nouveau Monde passent donc entre leurs mains.

Son alliance ferme avec les van de Kuypers n'empêche pas Maximilian de chercher à améliorer la position de sa Maison. D'après lui, on ne peut que nager ou couler; le sur place n'existe pas (cette image est d'autant plus amusante que le vieux Max a terriblement peur de l'eau; il ne navigue même pas sur les canaux et préfère systématiquement sa chaise à porteur pour ses déplacements). Qu'il ait demandé la main de Clotilde de Rœlef pour en finir avec la rivalité opposant leurs deux Maisons n'aurait donc dû surprendre personne. Mais surprise il y a eut et des plus désagréables pour lui : Clotilde a répondu par un éclat de rire prolongé jusqu'aux larmes et Maximilian n'a pas oublié cette humiliation publique. Il rêve chaque jour d'une occasion de vengeance contre cette " reine du trottoir vieillissante ". Son héritier désigné est son fils, Stefan, 40 ans.

LES GUILDES

Les Dix ne sont pas les seuls à se serrer les coudes : presque tous les Marienbourgeois sont regroupés en guildes professionnelles. Celles-ci réglementent la concurrence entre membres, qu'elles protègent de la concurrence extérieure. Elles constituent le seul filet de sécurité sociale de la cité si l'on excepte les hospices de Shallya. Ce type d'organisation existe dans toutes les communes et cités du Vieux Monde, depuis les guildes fermement contrôlées de Talabheim et Kislev aux " clubs " plus ou moins anarchiques de Brionne et Miragliano, mais c'est à Marienburg que le système a atteint son plein développement. Les guildes sont si nombreuses et leurs pouvoirs si grands qu'un auteur de théâtre impérial se serait écrié qu'il était " un barde piégé dans une cage de guildes " en apprenant que pour monter sa pièce, il lui faudrait nécessairement recruter des employés dans pas moins de quatre guildes.

Marienburg accueille une foule de guildes, riches et immenses pour certaines ou minuscules et sans importance. Trois des plus importantes sont décrites en détail, la Guilde des Débardeurs & Charretiers (p. 56), l'Association des Bateliers (p. 58) et la Guilde des Pilotes et Marins (p. 59). Mais il y en a bien d'autres : les Maçons et Couvreurs, avec leurs poignées de mains secrètes et autres rituels; la Guilde des Verriers, exilée sur une petite ile près de Rijkspoort pour se prémunir contre les trop fréquentes explosions de ses ateliers; le Collège des Chirurgiens et Barbiers, qui remonte à l'époque où seuls les barbiers étaient autorisés à pratiquer la chirurgie à Marienburg. Il y en a encore des dizaines et même les mendiants ont leur guilde, la Fraternité du Malheur qui décide qui peut mendier où.

Personne ne peut travailler ou commercer à Marienburg sans être membre d'une guilde. La cité est devenue une " boutique fermée " où les étrangers ne sont plus autorisés à voler le travail et les marchés des bons citoyens. Vous voulez gagner votre vie comme Champion Judiciaire? Sans un permis de la Ligue des Litigant, vous risquez une grosse amende et la condamnation automatique de votre client! Vous songez à gagner quelques piécettes grâce à un spectacle de rues? Que les gorilles de la Guilde des Amuseurs l'apprennent, et vous allez voir comment ils traitent les " braconniers ". De toute façon, vous aurez les mendiants et leur Fraternité sur le dos dès que vous essaierez de faire la quête!

Les privilèges des guildes sont protégés avec plus ou moins de férocité selon les organisations. Certains s'appuient sur la loi et dénoncent les contrevenants à la Garde. Ce type d'action se traduit généralement par une amende de 5 Gu et la délivrance d'un permis valable pour la semaine moyennant 2D6 Gu. Quiconque pratique un métier plus d'une semaine doit présenter une demande d'adhésion à la guilde correspondante sous peine de poursuite au pénal, pour fraude la plupart du temps. Les contrevenants récidivistes finissent par être frappés d'interdit : aucun maître ne peut plus les engager ni leur enseigner les secrets de la guilde.

D'autres guildes se montrent encore plus vindicatives. La pratique illégale de la médecine est assimilée à Marienburg à une tentative de meurtre avec une peine minimum de 5 ans d'emprisonnement sur Rijker. Pour les sorciers nouvellement arrivés dans la cité, mieux vaut se présenter immédiatement aux Conseils des Examinateurs du Collège Henryk; ils seront traités dans le cas contraire comme des Nécromanciens et remis au culte de Mórr et à la Cour Templière afin d'être interrogés et brûlés. Ils peuvent bien sûr se disculper par un examen d'urgence devant une assemblée de leurs pairs, mais les frais sont alors très élevés. Les guildes laborieuses adoptent généralement des approches plus directes : si vous prétendez décharger vous-même vos propres marchandises de votre propre bateau, vous êtes bon pour une " conversation " avec quatre ou cinq membres des Débardeurs dans une ruelle sombre. Et ne vous montrez pas entêté... un incendie à bord est si vite arrivé.

Les guildes réglementent l'activité de leurs membres et lèvent des cotisations, mais elles assurent aussi nombre d'avantages, le premier étant bien sûr un travail. Ceux qui cherchent des bras se rendent à la maison de la guilde qui répartit les tâches entre ses membres, quitte à faire appel à d'autres guildes quand cela s'avère nécessaire. Par exemple, un capitaine n'engage pas n'importe qui sur les quais pour déplacer sa cargaison, pas s'il veut conserver l'usage de ses genoux en tous cas. Il va proposer son contrat à la maison de la guilde ou, le plus souvent, trouve un contremaître sur le port et engage une équipe par son intermédiaire. Moyennant un petit supplément " pour la caisse des veuves et des orphelins ", son navire pourrait même être déchargé avant Marktag prochain.

Les guildes servent aussi de sécurité sociale. Elles ont développé leurs propres sociétés d'entraide, généralement sous la forme de " clubs chapelles " consacrés à un aspect particulier d'une divinité patronne, comme Ranald le Protecteur. Un membre remplit les fonctions de chapelain et garde les donations au nom de la divinité. Les membres en difficulté peuvent obtenir auprès de lui un soutien dont l'importance dépend, en définitive, de la taille et de la richesse de la guilde considérée. La Guilde des Racleurs de Coques est si pauvre qu'elle de possède même pas de Maison de Guilde, ni de salle réservée dans les locaux d'une autre guilde. Elle se réunit à la taverne du Veinard et c'est le patron qui sert de chapelain et garde le maigre fonds d'entraide dans une boîte sous le comptoir. Le mieux qu'il puisse faire est d'offrir une pinte de bière un Festag sur deux et payer un shilling d'argent à un prêtre de Mórr afin qu'il dise quelques prières pour chaque membre défunt et qu'on ne voit pas celui-ci à la prochaine réunion.

En revanche, la Guide des Débardeurs et Charretiers offre une protection très complète. Elle garantit bien sûr du travail honnêtement rémunéré mais aussi des pauses régulières, une pension pour les veuves, un revenu minimum en cas de maladie ou de grève, un loto chaque Hexenstag et un prêt automatique pour payer la caution en cas d'arrestation. La guilde exige naturellement en échange une loyauté absolue : il faut travailler quand elle le dit, faire grève quand elle l'exige et ne pas poser de questions sur ce curieux lot de caisses, n'est-ce pas? Et malheur à qui veut jouer les jaunes.

Les guildes occupent une place centrale dans la vie de l'homme de la rue et lui offrent une représentation politique. Dans les Maisons des Guildes ou les auberges amies, il peut rencontrer des gens qui lui ressemblent, discuter des événements du jour et bavarder en buvant un bol de soupe ou une bière. Les familles s'y retrouvent pour y célébrer les fêtes religieuses ou civiles après le service au temple. Nombre de guildes soutiennent des équipes sportives qui s'opposent à d'autres équipes de guilde ou de quartier : les fléchettes sont très populaires, de même que les quilles, la lutte, la natation, les courses de bateaux sur les canaux et, de plus en plus, le ballon d'eau. Ce sport a débuté comme une sorte de ballon morveux, mais une vessie de porc a remplacé le morveux entravé quand il est devenu évident que ce dernier ne flottait pas vraiment.

Les Maisons des Guildes sont aussi des refuges en cas de crises, quand leurs membres doivent défendre leurs droits. Quand le Directorat avait interdit toute grève en 2449 C.I., les grèves et émeutes organisées par la " cabale des maisons de bière " des maîtres de guildes avaient mis la cité à genoux et garanti pour toujours le droit d'appartenir à une guilde et la pause café pour tous. Le Directorat a systématiquement veillé, depuis, à ce que chaque loi en préparation susceptible d'affecter les intérêts d'une guilde soit préalablement visée par le maître de guilde concerné.

Les PJ qui souhaitent pratiquer leur métier à Marienburg en toute légalité vont devoir rejoindre une guilde. Un apprentissage commence à l'âge de 13 ans et dure généralement 5-7 années. Les PJ préfèreront sans doute démarrer comme compagnon indépendant afin de se mettre à leur compte sur-le-champ. Le MJ peut interpréter la hiérarchie de la guilde en jeu de rôle ou simuler ces rencontres par une série de jets de compétence appropriés à l'activité postulée et des tests de Soc et de corruption visant à convaincre les examinateurs de la sincérité du postulant. En cas de succès, le PJ reçoit, après versement d'une cotisation de 2D6 guilders, une licence professionnelle valable un ans. En cas d'échec, il ne perçoit qu'un sourire poli et de solides encouragement : il aura plus de chance une autre fois,; l'année prochaine.

Il ne faut pas oublier que les guildes existent en premier lieu pour garantir l'activité de leurs membres actuels,; si les ateliers des maîtres voiliers absorbent déjà sans difficulté toutes les commandes, pourquoi risquer d'éclaircir la soupe en la distribuant plus largement? De fait, un MJ n'est pas obligé de laisser un PJ exercer un métier qui ne convient pas à ses projets de campagne. Il peut se contenter de répondre, par l'intermédiaire du secrétaire de la guilde concernée, " Désolé. Nous avons déjà tous les avocats que la cité requiert. Essayez peut-être la Guilde des Écaillers. "

"Mais bien sûr que les guildes nous rackettent! Mais les maîtres des guildes sont issus du peuple et n'oublient pas les leurs. Ils sont peut-être des arnaqueurs, mais ils sont aussi des nôtres."
- un pilote de Marienburg